Elena Obeid
Épidémiologiste, nutritionniste
Paris XII
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E-mail : mdv.nutrition@gmail.com
L'impact de la qualité nutritionnelle des prises alimentaires sur la santé est de mieux en mieux connu. Cependant, l'impact du rythme et de l'horaire de celles-ci n'est que très peu étudié. Pourtant, des preuves de plus en plus nombreuses suggèrent que les altérations du rythme circadien dues à certains comportements à des horaires irréguliers, caractéristiques de la société occidentale moderne, pourraient jouer un rôle important dans l'augmentation de la charge des maladies non transmissibles.
Par exemple, le travail de nuit a été classé comme probablement cancérogène pour l'Homme par le Centre International de Recherche sur le Cancer, et a été associé à une augmentation de risque de plusieurs maladies, dont le psoriasis chez les femmes. En plus de l'exposition à la lumière qui agit sur l'horloge centrale, les prises alimentaires sont les principaux facteurs resynchroniseurs (zeitgebers) des horloges périphériques, surtout au niveau du foie. Plus globalement, la rythmicité des comportements alimentaires (heures et fréquences des repas), au delà de la qualité de l'alimentation elle-même, varie à travers les différents stades de la vie (enfance, jeunesse étudiante, jeunesse active, milieu de vie, retraite), et à travers les saisons ou activités sociales (jours travaillés, week-ends, congés, voyages et décalages horaires).
Ces variations et perturbations circadiennes sont influencées par la société et la vie professionnelle. Par ailleurs, les médias, les réseaux sociaux et des initiatives commerciales diverses ont suscité, sans preuve scientifique d'efficacité, une explosion de l'intérêt du grand public et des patients à pratiquer le jeûne intermittent (en particulier l'alimentation limitée dans le temps), promu pour améliorer la santé métabolique et limiter le surpoids.
Des études expérimentales montrent que des souris nourries uniquement pendant leur phase active étaient protégées contre l'obésité, l'hyperinsulinémie et l'inflammation, comparées à d'autres consommant les mêmes calories étendues sur 24h. Malgré les résultats de ces études expérimentales, des questions fondamentales sur le risque de maladies non-transmissibles restent sans réponse chez les humains, et l'horaire et la fréquence optimaux des repas quotidiens et du jeûne pour la santé métabolique sont inconnus.
La communauté scientifique et médicale accorde une attention croissante au rôle de ces comportements ou régimes dans la santé métabolique et les dermatoses inflammatoires (6,7), compte tenu de la plausibilité mécanistique forte de ces liens, et des liens suggérés entre heures des repas et composition du microbiote intestinal. Cependant, les études épidémiologiques à grande échelle explorant l'association entre l'alimentation limitée dans le temps, en distinguant l'early time-restricted feeding (eTRE ou l'alimentation limitée dans le temps à partir du matin) et le late time-restricted feeding (lTRE ou l'alimentation limitée dans le temps à partir du midi) sont quasi-inexistantes, en partie parce que la collecte de ces données nécessite des questionnaires alimentaires répétés détaillés incluant les heures des repas, indisponibles dans la plupart des études dans le monde.
L'hypothèse de la thèse est qu'il existe, au-delà de la qualité nutritionnelle, des heures et des durées optimales des prises alimentaires permettant d'améliorer la santé et de contribuer à prévenir les maladies chroniques. Les individus ayant des comportements proches de cet optimum auraient des profils métaboliques, inflammatoires et oxydatifs plus favorables, et un moindre risque de maladies chroniques. Les étapes clés de la vie seraient accompagnées au-delà des changements de la qualité de l'alimentation, de rythmes alimentaires qui s'éloignent ou se rapprochent de ces optimums.
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