Efficacité et tolérance des traitements à long terme

EpiDermE a développé une expertise sur l’exploitation des données massives et complexes du Système National des Données de Santé (SNDS) géré par la Caisse Nationale de l’Assurance Maladie (CNAM), avec une collaboration initiale et régulière avec le Groupement d'Intérêt Scientifique (GIS) EPI-PHARE.

EPI-PHARE réuni les services de pharmaco-épidémiologie de l’ANSM et de la Cnam dans le but d’apporter une expertise publique, autonome, indépendante et réactive en matière de pharmaco-épidémiologie et de sécurité sanitaire.

Risque d'infection grave chez les patients atteints de psoriasis
Étude de cohorte de 44 239 patients à partir des données du SNDS

Les biothérapies [BioMarqueurs (BM)] et l’aprémilast (APRE) sont indiqués dans le cadre du psoriasis de formes sévères à modérées en cas de contre-indication ou d’échec des traitements systémiques non biologiques. Ils incluent les anti-TNF alpha [étanercept (ETA), infliximab (INF), adalimumab (ADA), certolizumab (CERTO)], l’anti-IL12/23 [ustékinumab (UST)], les anti-IL17 [secukizumab (SECU), ixekizumab (IXE), brodalumab (BRODA)] et les anti-IL23 [guselkumab (GUS) et risankizumab]. Peu de données concernant le risque d’infection grave sont disponibles sur les biomédicaments les plus récents (anti-IL17 et anti-IL23).

L’objectif principal de l’étude était d'estimer le taux d’incidence (IT) des infections graves dans une population psoriasique initiant une biothérapie, déterminer le risque différentiel d’infections graves selon les BM ou APRE.

La population adulte psoriasique a été sélectionnée entre 01/2008 et 05/2019 à partir des données de remboursement et d’hospitalisation du Système National des Données de Santé (SNDS). Le psoriasis était défini par la délivrance de 2 traitements topiques à base de vitamine D sur une période de 2 ans. Étaient inclus les nouveaux utilisateurs de BM ou d’APRE (sans aucune délivrance de ces traitements dans l’année précédente). La date de 1ère délivrance était retenue comme date index. Les maladies associées, les comorbidités et les co-prescriptions étaient recueillies. La survenue d’une infection grave durant le suivi était comparée selon l’exposition (ETA comme groupe de référence) par un modèle de Cox multivarié et une régression de Fine & Gray (2) ajustée sur les caractéristiques sociodémographiques (âge, sexe, l’accès à une couverture maladie universelle complémentaire) et médicales (comorbidités cardiovasculaires, pulmonaires, hépatiques, rénales, rhumatisme inflammatoire, maladies inflammatoires chroniques des intestins, cancer et co-prescriptions).

Au total, 48 239 patients étaient des nouveaux utilisateurs de BM ou APRE (29 618 initiaient un anti-TNF, 6 658 un anti-IL12/23, 4 093 un anti-IL17, 526 un anti-IL23 et 3 344 APRE) âgés de 48 (+/-14) ans, 52% étaient des hommes, durée moyenne de suivi de 1.5 ans ±1.3. Le nombre total d’infections graves était de 1 656, avec un taux d’incidence était de 25(IC95% 23.8–26.2) pour 1000 personnes-années.Les infections graves les plus fréquentes étaient gastro-intestinales (n=645, 39%). En analyse multivariée, comparé aux patients sous ETA les patients sous INF et ADA étaient plus à risque de présenter une infection grave (Hazard ratio HRw1.79, IC95% 1.49-2.16; 1.22, IC95% 1.07-1.38 respectivement). Les patients sous USK étaient moins à risque de présenter une infection grave (HRw 0.79, IC95% 0.67-0.94). Aucune différence n’était notée pour les autres BM. Les résultats étaient similaires avec le décès pris en risque compétitif.

Ces résultats portant sur une large population de patients psoriasiques confirment le sur-risque d’infections graves sous INF déjà rapporté dans la cohorte anglaise BADBIR. En outre, ils suggèrent une légère augmentation du risque sous ADA qui nécessite d’être confirmée, et un moindre risque sous USK comparé à l’ETA. Le risque d’infection grave sous anti-IL17 et anti-IL23 n’apparait pas augmenté.

Étude réalisée dans le cadre d’une thèse de doctorat de Santé publique et recherche clinique (Lætitia Penso)

Traitement du psoriasis et risque d’hospitalisation ou de décès par COVID-19
Étude de cohorte auprès de 1,326,312 patients atteints de psoriasis en France

De nombreuses comorbidités, incluant le psoriasis,ont été associées à des formes sévères de COVID-19, définies par une hospitalisation. Un sur-risque de décès lié à COVID-19 n’était pas mis en évidence dans cette même population. Nous nous sommes demandé si ce sur-risque d’hospitalisation était lié à la maladie elle-même ou aux traitements systémiques.

L’objectif principal de l’étude était d'estimer le risque d’hospitalisation ou de décès à l’hôpital par le COVID-19 chez les patients atteints de psoriasis selon leur schéma thérapeutique.

La population adulte psoriasique a été sélectionnée entre 01/2008 et 05/2019 à partir des données Système National des Données de Santé (SNDS). Étaient exclus les patients séropositifs au VIH, transplantés ou ayant recours à des actes de dialyse. 2 périodes étaient définies : du 15/02 au 30/06/20 (1ère vague) et du 1/10 au 31/01/21 (2ème vague). La survenue d’une hospitalisation ou de décès à l’hôpital pour COVID-19 durant le suivi était comparée selon l’exposition dans les 6 mois précédant les dates index (i. biomédicaments, ii. systémiques non-biomédicaments, iii. topiques, VS. iv. non exposés) par un modèle de Cox multivarié pondéré sur les caractéristiques sociodémographiques (âge, sexe, région de résidence, indice de défavorisation) et médicales (évènement cardiovasculaire important, hypertension, maladies métaboliques, BPCO, maladies hépatiques, cancers et maladies neurologiques).

Durant la 1ère vague, 1,326,312 patients atteints de psoriasis ont été identifiés (âge moyen: 59 ± 16 ans; hommes: 48%): 3,871 ont été hospitalisés pour COVID-19 dont 759 (20%) sont décédés. Durant la 2ème vague, 1,289,962 étaient toujours à risque de survenu de l’évènement d’intérêt (âge moyen: 59 ± 16 ans; hommes: 48%): 3,603 ont été hospitalisés pour COVID-19 dont 686 (19%) décès. Lors de la 1ère vague, en multivariées, le risque d’hospitalisation pour COVID-19 était associé à une exposition aux topiques (hazard ratio, 1.11; intervalle de confiance95%, 1.04–1.20, p<10-2) et aux systémiques non biomédicaments (1.27; 1.09–1.48, p<10-2) mais pas aux biomédicaments. Lors de la 2ème vague, toutes les expositions, incluant les biomédicaments, étaient associées au risque d’hospitalisation pour COVID-19. Aucune association n’était retrouvée pour le risque de décès à l’hôpital pour COVID-19 et l’exposition lors de la 1ère et 2ème vague vague.

À partir des données quasi-exhaustives de l’assurance maladie, cette étude n’a pas mis en évidence de sur-risque de décès lié au COVID-19 et l’exposition aux traitements systémiques (biomédicaments et non-biomédicaments). Le sur-risque d’hospitalisation pour COVID-19 des patients psoriasiques recevant un traitement topique ou systémique peut refléter un meilleur suivi des patients par le système de santé. Ces résultats soutiennent les recommandations de maintien des traitements systémiques et de la continuité des soins pour le psoriasis durant la pandémique.

Persistance de l'aprémilast dans le psoriasis modéré à sévère : une étude comparative en vie réelle
auprès de 14 147 patients sous aprémilast ou méthotrexate à partir des données de l'assurance maladie

L’aprémilast, un inhibiteur de la phosphodiestérase-4, est une thérapeutique ciblée nouvellement développée dans la prise en charge des patients psoriasiques. Son efficacité par rapport au méthotrexate n’a pas été évaluée.

L’objectif principal de l’étude était d'évaluer et de comparer la persistance à long terme de l'aprémilast et du méthotrexate dans une large cohorte de patients psoriasiques.

Cohorte basée sur la population nationale par l'analyse des données de la base de données nationale de l'assurance maladie [Système National Inter-Régimes de l'Assurance Maladie (SNIIRAM)] et de la base de données nationale des hospitalisations [Programme de Médicalisation des Systèmes d'Information (PMSI)]. Tous les patients adultes atteints de psoriasis ayant été inscrits dans la base de données de la Caisse Nationale de Santé (Cnam) entre 2009 et 2017 étaient éligibles à l'inclusion. La population étudiée comprenait des patients naïfs d'aprémilast et de méthotrexate, c'est-à-dire ceux ayant une première prescription d'aprémilast ou de méthotrexate. Persistance du traitement, définie comme l'intervalle de temps entre le début et l'arrêt du traitement. Les taux de persistance ont été comparés à l'aide d'un modèle de Cox avec un appariement sur le score de propension qui incluait des facteurs de confusion potentiels (notamment l'âge, le sexe, l'arthrite psoriasique, les comorbidités et l'exposition antérieure à des traitements topiques et systémiques).

Au total, 14 147 patients adultes atteints de psoriasis (âge moyen: 52,3; hommes: 55,2%) se sont révélés naïfs à la fois d'aprémilast et de méthotrexate. Après appariement sur le score de propension, deux sous-groupes de 4 805 patients présentant des caractéristiques de base similaires ont été constitués.Au total, 3 207 patients traités par l'aprémilast et 2 736 patients traités par le méthotrexate ont arrêté leur traitement. Les analyses du score de propension à la survie de Kaplan-Meier ont révélé un taux d'arrêt de 69% pour l'aprémilast et de 59% pour le méthotrexate au cours de la première année de traitement. Les patients traités par l'aprémilast présentaient un risque d'arrêt plus élevé que les patients de la cohorte traités par le méthotrexate lorsque l'on considère la population étudiée dans son ensemble (hazard ratio [Intervalle de confiance (IC) à 95%] = 1,28 [1,231,34]) ou une analyse appariée au score de propension (1,34 [1,27-1,41]; p = <10-4).

Nos données en vie réelle suggèrent qu'au cours de la 1ère année de traitement, le taux d’arrêt était significativement plus élevé pour les patients traités par l'aprémilast que pour les patients traités par le méthotrexate, quelles que soient les lignes thérapeutiques précédemment reçues.

Persistance de l'aprémilast dans le psoriasis modéré à sévère : une étude comparative en vie réelle
auprès de 14 147 patients sous aprémilast ou méthotrexate à partir des données de l'assurance maladie

Nécessité de connaître l'efficacité sur le long terme des traitements biologiques dans la prise en charge du psoriasis.

L’objectif principal de l’étude était d'évaluer la persistance des traitements biologiques utilisés pour la prise en charge du psoriasis dans une population non sélectionnée.

Étude de cohorte par l'analyse des données de la base de données nationale de l'assurance maladie [Système National Inter-Régimes de l'Assurance Maladie (SNIIRAM)] et de la base de données nationale des hospitalisations [Programme de Médicalisation des Systèmes d'Information (PMSI)]. Tous les adultes atteints de psoriasis ayant été enregistrés dans le SNIIRAM entre janvier 2008 et décembre 2016 étaient éligibles à l'inclusion. Le psoriasis a été défini comme la délivrance d'au moins deux prescriptions de médicaments topiques de dérivé de vitamine D sur une période de deux ans. La population de l'étude comprenait des patients naïfs de traitements biologiques, c'est-à-dire ceux ayant une première prescription d'étanercept, d'infliximab, d'adalimumab ou d'ustekinumab sans aucune autre délivrance de traitements biologiques les 2 ans précédent la date index. Persistance du traitement avec un traitement biologique, définie comme l'intervalle de temps entre le début et l'arrêt du traitement. Les patients naïfs d'un traitement biologique ayant interrompu leur 1er traitement systémique par un médicament biologique ont été suivis pendant les 12 mois après l'arrêt.

Un total de 874 549 patients a été identifié comme atteints de psoriasis (âge moyen: 53,8; hommes: 52,4%). Parmi ceux-ci, 16545 initiaient un traitement biologique (âge moyen: 48,6; hommes : 57,3%). La durée moyenne ± écart-type du suivi pour ces patients était de 3,6 ± 2,4 ans. Il y a eu 9 988 arrêts de traitement. Les analyses de survie de Kaplan- Meier ont révélé un taux de persistance de 61,9% la première année, 33,3% la troisième année et 22,6% la cinquième année. L'ustékinumab avait le taux de persistance le plus élevé que les autres produits biologiques . Environ 85% des patients ayant interrompu leur premier médicament biologique ont repris un traitement systémique l'année suivante (un médicament biologique dans 85% des cas).

Nos données montrent que la persistance des traitements biologiques est faible en population "en vie réelle", et suggèrent que les traitements biologiques sont moins efficaces sur le long terme qu’attendu. Ces résultats soulignent la nécessité d '"études de stratégies thérapeutiques", en vue de l'élaboration de recommandations.

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